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24 janvier 1959. Le Mexique rompt ses relations diplomatiques avec le Guatemala


Frontera entre México y Guatemala. Cerca de la Tecnica. Wikimedia Commons

Depuis quelques années, la tension montait à la frontière. Et le Guatemala comptait avec exaspération les entrées mexicaines illégales sur son territoire –des trafiquants de bois aux voleurs de crevettes– sans que les autorités de son grand voisin du nord ne réagissent vraiment. Aussi, lorsque fin décembre 1958 les forces aériennes guatémaltèques repèrent un groupe d’embarcations en pleine campagne de pêche furtive dans leurs eaux territoriales, le gouvernement du pays centraméricain décide de saisir l’occasion pour taper du poing sur la table. Et lorsque, comble de désinvolture, les pêcheurs mexicains répondent par des gestes obscènes aux sommations des militaires, ces derniers hésitent encore moins et ouvrent le feu. Bilan de cette intervention, élégamment baptisée « Opération Drake » : 3 mexicains morts et 14 blessés, qui seront considérés dès lors comme prisonniers.

Le Mexique proteste immédiatement, dénonce une attaque militaire injustifiée contre des civils et demande la libération et le dédommagement de ses citoyens. Mais le Guatemala résiste et fait valoir son plein droit à intervenir contre des pirates présents sur son territoire. Surtout, en bon joueur de poker, il sort de sa manche la longue liste des plaintes adressées depuis 1954 aux autorités mexicaines et restées sans suite. Les pêcheurs seront assez vite jugés et progressivement libérés à partir du 22 janvier. Mais les relations entre les deux pays se dégradent à toute allure. Et le 24 janvier le Mexique rompt ses relations diplomatiques avec le Guatemala.

A partir de ce moment, la stratégie de l’escalade est de mise. Le président guatémaltèque, Manuel Ydígoras, peu légitime en interne, joue le sentiment nationaliste pour détourner les critiques sur sa gestion. Et ses bonnes relations avec les Etats-Unis lui donnent une assurance supplémentaire sur la scène internationale. Il n’hésitera d’ailleurs pas à dénoncer devant les Nations Unies un projet d’invasion de la part du Mexique (la mythique « Opération Gaviota » qui mériterait bien une télénovela).

Coté mexicain, le tout nouveau président de la république, Adolfo López Mateos, mise sur la prudence. D’autant qu’il occupe également, à cette période, la présidence tournante de l’Organisation des Etats Américains (OEA) et qu’une action militaire mexicaine sur le continent ferait mauvais effet. Les deux pays échangent donc leurs griefs via la Cour internationale de justice et l’OEA, tout en mobilisant leurs troupes sur la frontière. Les médias mexicains et guatémaltèques se chargent, eux, de faire monter les sentiments nationalistes des deux côtés de l’Usumacinta. Les ponts qui unissent les deux pays brulent, littéralement, et le Guatemala rompt à son tour les relations diplomatiques en mars; après avoir accusé le Belize (92.000 habitants en 1960) de fomenter lui aussi une invasion du pays aux côtés du Mexique.

En aout, finalement, sans doute un peu lassé par toute cette histoire, López Mateos réouvre la porte à une intermédiation externe en vue de trouver, insiste-t-il, une entente acceptable pour tous. Le Guatemala, embarqué par les Etats-Unis dans la contre-offensive contre Cuba, l’accepte immédiatement. Et le 15 septembre, le président mexicain annonce officiellement la reprise des "relations diplomatiques, de solidarité et d’amitié" entre les deux pays. Le Guatemala déclare son regret d’avoir eu recours à la violence et accepte d’indemniser les pêcheurs. Le Mexique, lui, s’engage à agir contre les activités illégales qui prospèrent de l’autre côté de sa frontière. La page est tournée. Ou presque...

©Masiosarey, 2018

 

Pour tout savoir sur cette histoire : OPERACION GAVIOTA: El ataque mexicano a Guatemala

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