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Un regiomontano à Paris... Franco Escamilla au Grand Point Virgule


Artistes, public, organisateurs... tous sont unanimes : une tournée mondiale d’un humoriste mexicain, c’est du jamais vu. C’est pourtant le pari qu’a fait Franco Escamilla, véritable star du stand-up au Mexique et dans toute l’Amérique latine, en partant en tournée avec son spectacle « Por la anecdota ». A Paris, juste avant une représentation à guichet fermé, au Grand Point Virgule le 19 novembre dernier, Franco Escamilla répondait aux questions de Masiosarey.

Affiche Franco Escamilla World Tour 2017

A quelques minutes du début du spectacle, une même agitation traverse l’équipe : « Sold out ? - Sold out ! ». Le défi est relevé, et avec succès : une fois encore, le spectacle se joue à guichet fermé. La satisfaction est visible...et partagée. Les premiers mots de Franco Escamilla à son arrivée sur scène seront pour remercier son public de s’être déplacé si nombreux et d’avoir rempli, jusqu’au dernier strapontin, la grande salle du Grand Point Virgule. Les remerciements pourtant, c’est surtout dans la bouche du public qu’on les entend. Mexicains surtout, Latinos ensuite, quelques Français aussi n’ont de cesse de remercier Franco de leur « apporter un peu de Mexique dans l’hiver parisien ». Car c’est bien le Mexique que sont venus chercher les spectateurs, et quand Alexis le Rossignol -humoriste français qui a fait ses débuts aux côtés de Franco Escamilla– monte sur scène pour la première partie, au son d’un enregistrement du fameux cri « colchoooneeees, lavadooraaaaas, microoondaaaaas », le rire et la nostalgie se partagent les cœurs.

©Masiosarey, 2017

Alexis le Rossignol et Franco Escamilla au Grand Point Virgule

D’ailleurs, pour Franco Escamilla lui-même, cette tournée mondiale (Etats-Unis, Japon, Australie, Maroc, Grande-Bretagne, France, Allemagne, Espagne…) a pour but premier d’offrir son spectacle à tous les expatriés, qui, s’ils « sont tombés amoureux du pays dans lequel ils vivent maintenant, regrettent quand même, un petit peu, le Mexique ».

Ceux-ci sont formels : le public mexicain est très différent du public français, et retrouver l’ambiance des salles mexicaines leur a fait chaud au cœur; les rires, applaudissements, commentaires à mi-voix et réponses enthousiastes qui fusent au parterre du Point-Virgule sont bien loin du sérieux et de la retenue du public français. L’humour lui-même diffère. Franco Escamilla l’explique simplement : pour lui, les humoristes américains dans leur ensemble sont des champions de l’histoire, de l’anecdote, de « raconter le quotidien », alors que les Européens sont spécialistes d’un humour plus analytique, qui joue à déconstruire pour faire rire.

Le spectacle Pour l’anecdote est un exemple parfait de cet humour « qui raconte ». Pendant presque deux heures, Franco raconte à un auditoire suspendu à ses lèvres ses rendez-vous avec l’institutrice de ses enfants, les inévitables punitions qui s’ensuivent et les désaccords avec sa femme pour décider de la conduite à tenir… Vient ensuite la traditionnelle comparaison hommes-femmes, cette fois sur la gestion de la salle de bain. L’ensemble du spectacle est consensuel, familial, parfois un peu cynique mais jamais méchant. Rien de politique, rien de critique, mais un moment agréable où l’on rit ensemble. C’est le but recherché par Franco Escamilla. « Certains font des spectacles d’humour noir, des spectacles très politiques, il y a un peu de tout dans l’humour. Moi je raconte des petites histoires, parce que le quotidien peut être très drôle, et que cela touche tout le monde. Ce dont je parle, ça arrive à tout le monde. Tout le monde s’y reconnaît, et c’est pour cela que les gens rient. » Il s’en amuse d’ailleurs, pendant son spectacle : « maintenant, à chaque fois que je dois écrire un spectacle, je me demande : « qu’est-ce que je vais bien pouvoir raconter ? » Quand j’ai commencé, ma vie était une telle galère qu’il me suffisait de raconter ma journée pour faire rire le public. Mais maintenant que tout va bien, je suis obligé de me mettre moi-même dans des situations incroyables pour avoir de quoi écrire un spectacle. Je sais que ça va mal se terminer, mais j’y vais quand même : au moins j’aurai quelque chose à raconter ».

La recette fonctionne : le succès de Franco Escamilla, au Mexique et plus loin, ne se dément pas. Plusieurs millions d’abonnés sur Facebook, Twitter, Youtube, des centaines de milliers d’auditeurs pour ses programmes de radio, autant pour ses émissions de télé hebdomadaires, re-transmises sur sa chaîne Youtube tous les lundis, et des spectateurs toujours plus nombreux lors de chacun de ses spectacles.

Lorsque l’on rencontre le personnage, on comprend vite les raisons de ce succès phénoménal : un trentenaire souriant, disponible et attentif, si abordable qu’il semble n’avoir pas conscience de son succès, marié et père de deux enfants... L’identification marche à plein régime. Il accueille chacun de ses fans avec un grand sourire et un mot gentil… si son image de « Mexicain moyen », certainement une des clés de sa réussite, résiste à la gloire, c’est qu’il garde la simplicité de ses débuts, les rapports très directs, frontaux avec son public, l’amitié qui le lie à son équipe de tournée. Il le dit lui-même : dans le stand-up, rien n’est jamais gagné. Le spectateur sent immédiatement si on lui ment. Depuis ses débuts dans les bars, où il lui fallait lutter pour se faire entendre parmi les conversations et les commandes, jusqu’à l’Auditorium National de Mexico, c’est toujours la même mise à nu, la même sincérité combative pour convaincre son auditoire.

Lorsqu’on lui demande comment il appréhende son spectacle au DF, le 3 décembre prochain, il répond sereinement qu’il aime le public chilango, et que le public chilango le lui rend bien. Des éventuelles différences d’humour entre le Nord où il vit, et la capitale où il va jouer, il s’amuse : « si j’arrive à jouer dans des pays d’Europe, il ne devrait pas y avoir de problème pour que je joue dans mon propre pays ! », et il ajoute « l’humour n’est pas si différent d’un bout à l’autre du pays. On a le point commun d’aimer les « chistes ». Tous les Mexicains aiment raconter ou entendre des « chistes ». »

Comme un rituel, lorsque les applaudissements éclatent à la fin du spectacle, Franco déroule un grand drapeau mexicain... c’est alors l’ovation dans la salle. Toute la communauté mexicaine réunie là salue l’homme, et le symbole, le pont créé entre les pays par le rire. Gageons que le retour de Franco Escamilla au Mexique sera triomphal… une chose est sûre, c’est que Franco a réussi l’exploit d’exporter le Mexique à travers le monde et de fédérer autour de son spectacle une communauté qui dépasse les frontières.

De Paris, Carmen Bailly pour ©Masiosarey, 2017

 
Franco Escamilla à Mexico

Franco Escamilla se présentera à Mexico, le dimanche 3 décembre 2017 à la Arena

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