Semaine du 17 au 23 avril 2017
LES ELECTIONS FRANÇAISES VUES DU MEXIQUE
Parce que le regard externe est souvent constructif, et en tout cas très intéressant, Masiosarey a décidé de dédier sa traditionnelle revue de la presse mexicaine aux élections en France.
La dernière ligne droite avant le premier tour
Petit manuel de l'élection à destination du public étranger
C'est la revue Expansión qui, dans un article du 22 avril, nous le délivre. Ainsi, vous saurez tout sur le déroulement d'une élection présidentielle en France et sur les principaux candidats de ce scrutin en particulier. A l'occasion, une lecture très utile également pour les électeurs français : vous apprendrez ainsi que le vote blanc est comptabilisé depuis 2014 et que l'on a utilisé 1.300 tonnes de papier recyclé pour réaliser les bulletins (information Europe 1 apparemment).
El Informador explicite la pratique des deux tours dans un article assez long consacré aux élections, le dimanche 23 avril. Et si le lecteur n'avait toujours pas compris le déroulement des élections françaises, l'article de El Universal répondait à tous les doutes : cet "étrange" système à deux tours, les 11 candidats et les principaux favoris, les sondages, les anciens présidents, les 1.300 tonnes de papier recyclé... Toutefois, le quotidien est le seul à expliquer l'étrange silence qui règne dans les médias français depuis le vendredi précédant les élections, la période de réserve.
Qui sont les candidats?
Cette semaine, la presse mexicaine s'est évidemment intéressée aux principaux protagonistes de l'élection. Ainsi, dimanche 23 avril, El Excelsior proposait les portraits des quatre principaux candidats (Emmanuel Macron, Marine Le Pen, François Fillon et Jean-Luc Mélenchon). Illustré par des images de l'Agence Reuters et sur la base des informations de cette même agence, l'article réussit une synthèse utile du positionnement et de la personnalité des candidats. On apprendra notamment que Emmanuel Macron, lors d'un meeting à Pau, a déclaré que les élites françaises ne pensaient qu'à leurs intérêts, information qu'il assume savoir de première main : "je le sais parce que j'en ai fait partie". On apprendra aussi que Marine Le Pen est une "joven" de 48 ans à la voix grave, et une amie de Poutine ; que François Fillon aime les courses de voiture, et plus particulièrement celle du Mans ; et que Jean-Luc Mélenchon veut sortir du FMI et de l'OTAN...
El Diario du Yucatán reprend visiblement les mêmes données, à savoir les informations fournies par l'Agence de presse Reuter, mais de façon moins détaillée. En revanche, il y ajoute un petit paragraphe sur les sept autres candidats.
L'article déjà mentionné de El Informador présente les candidats cette fois-ci en fonction de leur positionnement vis-à-vis de l'Europe et choisit prudemment de ne pas délivrer de pronostic, estimant que les quatre principaux candidats se trouvent à une trop courte distance les uns des autres.
Tout en reprenant le format des articles précédents, La Crónica de Hoy est nettement moins neutre. Et l'on comprend tout de suite vers qui penche son cœur lorsqu'elle introduit les candidats comme suit: "Le Pen, la favorite de Trump ; Melenchon, indigné et bolivarien ; Fillon, poursuivi par l'ombre de la corruption ; et Macron, l'espérance anti-populiste"...
Monitoring des sondages
Toute la semaine, la presse mexicaine a également relayé les sondages. Pour El Universal (17/04/2017), le premier tour va se jouer dans un mouchoir de poche, les quatre principaux candidats voyant leurs courbes d'intentions de vote se rapprocher dangereusement : une campagne "atypique" selon le quotidien mexicain. Pour sa part, Radio Imagen a scrupuleusement rapporté les sondages IPSOS publiés depuis le 17 avril et permet à l'auditeur de naviguer sur différents sites internet français. Le jour même de l'élection, le quotidien Publimetro se centre, lui, sur le taux d'abstention à mi-journée et en profite pour faire un point sur la question. Toujours à partir des derniers sondages IPSOS, le quotidien termine par un quarté gagnant. El Excelsior, qui s'intéresse décidément beaucoup à ces élections, propose une analyse de la situation le jour du premier tour, en reprenant cette fois les derniers sondages IFOP et de OpinionWay. La seule incertitude, selon ce quotidien, reste l'impact de la menace terroriste sur les résultats. Dans le même sens, El Informador reprend les propos d'une directrice de l'entreprise de sondage BVA, pour qui les récents attentats et la menace terroriste favoriseraient effectivement Fillon et Le Pen.
En général, ces articles reprennent l'information fournie par les grandes agences de presse internationales, plus ou moins simplifiée, plus ou moins travaillée. Ainsi, les opinions ou les éditoriaux s’avèrent-ils être beaucoup plus intéressants pour saisir la vision que les experts et journalistes mexicains ont de ces élections.
Des experts mexicains attentifs à la campagne et aux résultats
Le titre de la chronique de Cecilia Soto, publiée au lendemain des résultats dans El Excelsior, surprend. En effet, qui s'attendrait à voir dans les élections françaises le reflet de ce qui se passera lors des prochaines élections mexicaines? Après le premier paragraphe, on comprend toutefois que la comparaison s'arrête au nombre des participants et aux dangers de la fragmentation du vote. L'auteure propose un éclairage nécessaire sur le système à deux tours, perçu de manière frileuse au Mexique. Ainsi, selon elle, le principal problème que poserait l'application de ce système au Mexique est résolue, en France, par la réalisation d'élections législatives un mois plus tard. Et de poursuivre sur un plaidoyer pour l'adoption de ce système au Mexique et sur sa vision de la future présidentielle mexicaine de 2018.
Un second tour également plébiscité par Román Revueltas dans Milenio, car il constitue pour lui un rempart efficace contre le populisme. L'auteur profite d'ailleurs de sa colonne pour alerter les mexicains sur les dangers du populisme.
Sergio Mendiola, dans Enlace Judío, utilise un titre qui en dit long: "La France regarde le précipice". Cette chronique revient sur les prémices de la campagne et l'échec de la présidence de Hollande qui, selon lui, précipite aujourd'hui le parti socialiste vers la division. Ce qui surprend de l'article est la violente attaque contre l'organisation des primaires au sein des deux grands partis français, cause selon l'auteur du maintien de Marine Le Pen au second tour: "Les primaires furent une improvisation infecte".
Un mois avant les élections, Guillermo Almeyra avait, lui aussi, laissé échapper sa colère dans La Jornada, contre un gouvernement sortant qui n'aurait laissé aucune chance à une gauche unie de se retrouver au second tour.
De son coté, Adrián Espallargas dans Alto Nivel revient sur ce qui effraie le plus les marchés internationaux : la victoire de Marine Le Pen et son corollaire, le Frexit. Mais lorsqu'il évoque les candidats qui potentiellement pourraient lui faire barrage, le nom de Mélenchon et la perspective d’un duel entre les deux souverainistes ne lui semble pas beaucoup plus réjouissante.
Vicente Ugalde, dans une chronique publiée dans le Periódico Zócalo peu de jours avant les élections, revient sur les leçons à tirer de ce scrutin et sur les surprises qu'avait réservé la campagne. Raúl Crémoux, dans sa colonne dans El Financiero, relève lui aussi une campagne marquée par l'incertitude. Surtout il souligne que la nouvelle ligne de fracture politique en France n'est plus l'opposition gauche/droite mais celle entre les "européistes" et les anti-européens.
Et la conclusion revient à... Donald Trump!
Il serait fastidieux pour notre lecteur francophone, abreuvé depuis deux jours d'informations en direct et en continu sur les résultats des élections, de reprendre les notes réservées dans la presse mexicaine à la victoire au premier tour de Emmanuel Macron et de Marine Le Pen. Nous avons donc décidé de laisser le mot de la fin (de cette revue de Presse!) à ... Donald Trump!
La couverture de la moindre déclaration du président américain frisant l'obsession au Mexique, il était attendu que la presse mexicaine s'intéresse, aussi, à son opinion. C'est Noticiero Televisa qui s'y colle et s'y perd. Car le cher homme a été laconique: "Very interesting election currently taking place in France" En même temps, via twitter difficile d'en dire plus!